Par Canada Life | 8 avril 2022
John Yanchus, CPA, CA, TEP, directeur général de la planification fiscale et successorale
Le budget fédéral de cette année, intitulé Un plan pour faire croître notre économie et rendre la vie plus abordable, ne comporte pas de mesures influant directement sur les produits d’assurance vie, de protection du vivant ou de gestion du patrimoine. Il prévoit toutefois diverses mesures fiscales qui touchent les particuliers et les entreprises.
Dans un contexte de forte inflation, de surchauffe immobilière et de guerre en Ukraine, le budget de 2022 du gouvernement libéral, avec l’appui du NPD, mise sur l’accessibilité, le logement, la défense et la réconciliation avec les communautés autochtones. Dans l’ensemble, les dépenses sont moins importantes qu’elles ne l’ont été les années précédentes. Le déficit pour l’exercice prenant fin en 2022 devrait atteindre 113,8 milliards de dollars, une baisse comparativement à 327,7 milliards de dollars pour l’exercice 2021.
Les mesures fiscales suivantes présentées dans le budget pourraient intéresser les conseillers en sécurité financière.
Déduction accordée aux petites entreprises
Les sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC) jouissent actuellement d’un taux d’imposition des sociétés réduit sur la première tranche de 500 000 $ de revenu de société exploitée activement (le « plafond des affaires »). Communément appelé « taux d’imposition des petites entreprises », ce traitement fiscal produit un taux d’imposition combiné fédéral-provincial d’environ 12 % dans la plupart des provinces. Au-dessus de ce plafond des affaires, le revenu provenant d’une entreprise exploitée activement est généralement assujetti à un taux d’imposition combiné plus élevé d’environ 26 % dans la plupart des provinces.
En vertu des lois fiscales actuelles, le plafond des affaires de 500 000 $ est réduit selon la méthode linéaire lorsque :
- Le capital imposable utilisé au Canada combiné de la SPCC et de toute société associée se situe entre 10 millions et 15 millions de dollars;
- Le « revenu de placement total ajusté » combiné de la SPCC et de toute société associée se situe entre 50 000 $ et 150 000 $.
En particulier, le plafond des affaires correspond au moins élevé des deux montants déterminés par ces réductions du plafond des affaires.
Le budget propose d’éliminer l’accès au taux d’imposition des petites entreprises de façon plus graduelle conformément à la partie un de la formule ci-dessus. Le budget propose que le plafond des affaires des petites entreprises soit complètement éliminé lorsque le capital imposable atteint 50 millions de dollars, plutôt que 15 millions de dollars. La nouvelle fourchette serait donc de 10 millions à 50 millions de dollars en capital imposable. Cette mesure s’appliquerait aux années d’imposition qui commencent le 7 avril 2022 ou après cette date. Il convient de noter que, bien que la proposition s’applique seulement à la portion fédérale du taux d’imposition des petites entreprises, il est attendu que les provinces emboîteront le pas.
Ce changement permettrait à plus de SPCC de taille moyenne de bénéficier de la déduction accordée aux petites entreprises. À titre d’exemple, selon les nouvelles règles, jusqu’à 250 000 $ du revenu provenant d’une entreprise exploitée activement généré par une SPCC ayant un capital imposable de 30 millions de dollars serait admissible à la déduction accordée aux petites entreprises, comparativement à 0 $ en vertu des règles actuelles (en supposant qu’il n’y a pas d’ajustement du revenu de placement total ajusté au-delà de 50 000 $).
Le graphique suivant présente les réductions actuelles et proposées au plafond des affaires des petites entreprises en fonction du capital imposable.
Mesures fiscales du budget de 2022 : Renseignements supplémentaires
Planification pour non-SPCC
Le ministère des Finances s’inquiète de voir des contribuables constituer une société de portefeuille de placement de manière à éviter le mécanisme d’impôts remboursables qui s’applique habituellement au revenu de placement gagné par une société. À titre d’information, le revenu de placement gagné par une SPCC est assujetti à un taux d’imposition plus élevé que le revenu provenant d’une entreprise exploitée activement afin que les gens ne soient pas tentés de détenir leurs placements par le truchement d’une société. Le plus clair de l’impôt payé par une SPCC sur son revenu de placement est remboursable à la société lorsque celle-ci verse un dividende imposable. Par exemple, en appliquant les taux d’imposition de l’Ontario, le revenu en intérêts est assujetti à un taux d’imposition de 50,17 % duquel la portion remboursable représente 30,67 %. Sans aller trop en détail sur le sujet de l’imposition des sociétés, la portion remboursable de cette charge fiscale crée généralement un mécanisme anti-report pour qu’il n’y ait aucun avantage à gagner un revenu de placement par le truchement d’une SPCC.
Les fiscalistes ont mis au point une méthode de planification selon laquelle leurs clients font appel à une société de portefeuille de placement qui n’est pas admissible en tant que SPCC pour éviter le mécanisme anti-report de l’impôt remboursable. À titre d’exemple, une méthode de planification permettant d’éviter le statut de SPCC consiste à proroger une société canadienne en vertu du droit des sociétés d’une juridiction étrangère tout en maintenant sa résidence canadienne en conservant la gestion centrale et le contrôle au Canada. Un tel stratagème produit un revenu de placement assujetti à un taux d’imposition moindre. Selon l’exemple de l’Ontario ci-dessus, les intérêts gagnés dans une entreprise autre qu’une SPCC seraient assujettis à un taux d’imposition de 26,5 %. Ce type de planification est connu sous le nom de planification pour non-SPCC.
Le budget propose de modifier la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) pour harmoniser l’imposition du revenu de placement gagné et distribué par les « SPCC en substance » (par exemple, une non-SPCC) avec les règles qui s’appliquent actuellement aux SPCC. Selon les documents du budget, les « SPCC en substance seraient des sociétés privées résidant au Canada (autres que des SPCC) qui sont ultimement contrôlées (en droit ou en fait) par des particuliers résidant au Canada ». En fin de compte, cette mesure doit faire en sorte que les SPCC en substance sont imposées de la même manière que les SPCC. Il apparaît que les non-SPCC pourraient continuer de profiter du mécanisme du compte de dividendes en capital. Cette mesure s’appliquerait aux années d’imposition qui prennent fin le 7 avril 2022 ou après cette date.
Transferts intergénérationnels – l’histoire se poursuit
Le projet de loi C-208 a reçu la sanction royale le 29 juin 2021. Il modifie la Loi de l’impôt sur le revenu afin de permettre au propriétaire d’une petite entreprise de vendre ou de transférer ses actions admissibles d’une société agricole ou de pêche familiale de petite entreprise ou de ferme familiale à une société appartenant à un enfant ou à un petit-enfant majeur sans les conséquences fiscales qui s’appliquaient précédemment. Plus particulièrement, les modifications proposées dans le projet de loi C-208 font en sorte que le produit de la vente serait assujetti aux taux d’imposition des gains en capital plutôt qu’aux taux plus élevés d’imposition des dividendes.
Le 19 juillet 2021, le ministère des Finances a confirmé son intention de présenter des modifications législatives aux fins de consultation. Les modifications seraient apportées afin de veiller à ce que les dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu facilitent les véritables transferts intergénérationnels et ne soient pas utilisées aux fins de dépouillement de surplus sans véritable transfert d’une entreprise. À ce jour, aucune modification proposée par le ministère des Finances n’a été annoncée.
Le budget propose une période de consultation prenant fin le 17 juin 2022 pour permettre aux intervenants de donner leur avis sur la façon dont les règles existantes peuvent être « renforcées pour protéger l’intégrité du régime fiscal tout en continuant à permettre les transferts intergénérationnels d’entreprises légitimes ». La loi modifiée suivrait alors et pourrait être incluse dans un projet de loi déposé à l’automne 2022.
Renforcer la règle générale anti-évitement
La règle généralement anti-évitement (RGAE) contenue dans la Loi de l’impôt sur le revenu vise à empêcher les contribuables de procéder à une opération de façon abusive afin de réduire les impôts. Les tribunaux ont généralement considéré que la RGAE ne s’applique pas à une opération donnant lieu à une augmentation des attributs fiscaux d’un bien qui n’ont pas encore été utilisés pour réduire les impôts.
Pour y remédier, le budget propose de modifier la Loi de l’impôt sur le revenu pour que la RGAE puisse s’appliquer aux opérations qui touchent les attributs fiscaux d’un bien, qu’ils aient été utilisés ou non pour réduire les impôts. De plus, faisant suite aux commentaires formulés dans le budget fédéral de 2021 quant à son intention d’actualiser la RGAE, le ministère des Finances a également annoncé son intention de publier un document de consultation et de prévoir une période de consultation sur la question. L’avant-projet de loi suivrait d’ici la fin de 2022.
Impôt minimum pour les personnes à revenu élevé
Le budget annonce l’engagement du gouvernement à examiner un nouveau régime fiscal minimal, qui contribuera à ce que tous les Canadiens fortunés paient leur juste part d’impôt. Le gouvernement publiera des renseignements sur une approche proposée dans la mise à jour économique et budgétaire de l’automne 2022.
Logement
Très fortement axé sur le logement en général, le budget fédéral de 2022 s’articule plus particulièrement autour de cinq questions distinctes :
- Épargne – aide financière pour les particuliers grâce au compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété, qui permettrait aux premiers acheteurs d’épargner jusqu’à 40 000 $. Les cotisations seraient déductibles du revenu imposable et les retraits servant à l’achat d’une première propriété seraient non imposables. La croissance à l’intérieur du compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété serait également exempte d’impôt. L’entrée en vigueur de ce nouveau véhicule d’épargne est prévue en 2023.
- Taxe anti-opérations immobilières de vente-achat – nouvelles règles fiscales proposées dans le budget qui font en sorte qu’une personne qui vend une propriété qu’elle détient depuis moins de 12 mois verrait ses profits assujettis à l’imposition complète en tant que revenu tiré d’une entreprise. En vertu des nouvelles règles, l’exemption pour résidence principale ne serait pas disponible. Des exemptions seraient prévues pour les Canadiens qui vendent leur propriété en raison de certaines circonstances de la vie. Cette mesure s’appliquerait à la vente de propriétés résidentielles le 1er janvier 2023 ou après cette date.
- Restrictions visant les acheteurs étrangers – mesures interdisant aux entreprises commerciales étrangères et aux particuliers qui ne sont ni citoyens canadiens ni résidents permanents d’acquérir des propriétés résidentielles non récréatives au Canada pour une période de deux ans.
- Crédits d’impôt – bonification des crédits d’impôt existants pour soutenir les acheteurs d’une première propriété et proposition d’un nouveau crédit d’impôt pour faciliter la rénovation d’habitations multigénérationnelles.
- Construction – mesures visant à doubler le nombre de logements construits au cours de la prochaine décennie et à augmenter la disponibilité de logements abordables.
Mesures fiscales touchant les institutions financières
Selon les documents du budget, la pandémie a entraîné des dépenses de plus de 350 milliards de dollars par le gouvernement fédéral pour la santé et la sécurité et les mesures de soutien direct. Pour récupérer une portion de ces dépenses, le budget propose de mettre à contribution certaines banques et compagnies d’assurance vie au moyen des mesures suivantes :
- Un dividende temporaire pour la relance du Canada, au titre duquel les groupes de banques et d’assureurs vie (conformément à la partie VI de la Loi de l’impôt sur le revenu) paieront, sur une période de cinq ans, un impôt ponctuel de 15 % sur le revenu imposable supérieur à un milliard de dollars pour l’année d’imposition de 2021.
- Une augmentation permanente du taux d’imposition du revenu des entreprises de 1,5 % sur le revenu imposable des groupes de banques et d’assureurs vie (conformément à la partie VI de la Loi de l’impôt sur le revenu) au-dessus du seuil de 100 millions de dollars, de sorte que le taux général d’imposition fédéral du revenu des sociétés au-dessus de ce seuil augmentera de 15 % à 16,5 %.
Mesures fiscales qui n’ont pas été abordées dans le budget
Bien qu’il y ait eu de nombreuses spéculations quant à leur inclusion dans le budget, les mesures fiscales suivantes n’ont pas été abordées :
- Augmentation du taux d’inclusion des gains en capital
- Mesures touchant l’exonération de la résidence principale
- Mesures visant la planification des gains en capital
- Impôt sur la fortune
Les renseignements fournis dans le présent document visent uniquement à informer et ne doivent pas être considérés comme des conseils juridiques ou fiscaux. Des mesures raisonnables ont été prises pour assurer l’exactitude de l’information, mais des erreurs et omissions sont tout de même possibles. Tous les commentaires relatifs à l’imposition sont de nature générale et sont fondés sur les lois fiscales canadiennes actuelles visant les résidents canadiens, lesquelles peuvent changer. Il est recommandé de consulter un conseiller juridique ou un fiscaliste pour obtenir un avis sur une situation en particulier. Les renseignements contenus dans le présent document sont fournis par La Compagnie d’Assurance du Canada sur la Vie et étaient à jour en avril 2022.
Canada Vie et le symbole social, et Gestion de placements Canada Vie et le symbole social sont des marques de commerce de La Compagnie d’Assurance du Canada sur la Vie.