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Par Beutel Goodman | 14 juin 2021 

Alors que nous avançons dans l’année 2021, les investisseurs continuent de se concentrer sur les répercussions de la pandémie et sur l’environnement actuel de faibles taux. Dans ce contexte de grande incertitude, Beutel Goodman s’est entretenu avec deux de ses responsables des placements pour obtenir une certaine perspective plus tôt cette année. Écoutez David Gregoris, directeur général et cochef, Titres à revenu fixe, et James Black, directeur de la recherche sur les actions et vice-président, Actions canadiennes, pour une discussion approfondie sur les marchés des titres à revenu fixe et des actions, les portefeuilles de Beutel Goodman et les perspectives d’avenir. Vous découvrirez comment David et James ont mis à profit leurs 55 années d’expérience combinées en matière d’investissement pour faire face aux premiers stades de la pandémie. Ils mettent leur expérience à profit ensemble comme gestionnaires du Fonds équilibré de valeur mondiale, et ainsi qu’à titre individuel dans les fonds Équilibré et Actions canadiennes, tous deux axés sur le marché canadien.

Ce média est uniquement disponible en anglais. Pour la traduction française, veuillez consulter la transcription.

Description de vidéo:

Alors que nous avançons dans l’année 2021, les investisseurs continuent de se concentrer sur les répercussions de la pandémie et sur l’environnement actuel de faibles taux. Dans ce contexte de grande incertitude, Beutel Goodman s’est entretenu avec deux de ses responsables des placements pour obtenir une certaine perspective plus tôt cette année. Écoutez David Gregoris, directeur général et cochef, Titres à revenu fixe, et James Black, directeur de la recherche sur les actions et vice-président, Actions canadiennes, pour une discussion approfondie sur les marchés des titres à revenu fixe et des actions, les portefeuilles de Beutel Goodman et les perspectives d’avenir.

Transcription vidéo:

Linda Watts (LW) : Merci de vous joindre à nous. Je m’appelle Linda Watts. Je suis vice-présidente, Service à la clientèle/développement des affaires chez Beutel Goodman. Aujourd’hui, nous allons nous entretenir avec deux de nos gestionnaires de portefeuille, David Gregoris et James Black. 

L’année 2020 est terminée et, en ce début de 2021, les investisseurs continuent de se concentrer sur les répercussions de la faiblesse actuelle des taux. Nous avons pensé qu’il serait intéressant d’en parler tant du point de vue du marché des titres à revenu fixe que de celui du marché des actions. Nous commencerons donc par demander à David Gregoris, directeur général et cochef, Titres à revenu fixe, de nous faire part de ses perspectives macroéconomiques. David, noussommes heureux de vous recevoir. 

David Gregoris (DW) : Tout le plaisir est pour moi, Linda. 

LW : David, j’aimerais d’abord que nous parlions de 2020. Ce fut une année difficile, marquéepar la forte volatilité engendrée par la crise, mais votre équipe a très bien su composer avec le marché. D’ailleurs, toutes nos félicitations pour vos excellents résultats! Je sais que des dysfonctionnements ont été observés sur le marché obligataire, et je me demandais si vous pouviez nous parler de ce qui s’est passé sur ce marché ainsi que des principaux facteurs qui expliquent le succès de votre équipe. 

DG : Notre processus macroéconomique nous a guidés tout au long des turbulences qui ont marqué les marchés en 2020. Ce processus macroéconomique, qui résulte de l’analyse des cycles du marché sur plusieurs décennies, est fondé sur trois analyses fondamentales : premièrement, nos perspectives de croissance pour l’ensemble de l’économie; deuxièmement, l’évaluation des actifs risqués; troisièmement, la liquidité de l’économie et des marchés. 

Nous analysons ces conditions de marché au moyen de nombreux indicateurs macroéconomiques et de marché; ils nous fournissent des éléments de preuve qui nous permettent de déterminer ce qui a été pris en compte par les marchés. Nous appliquons ces éléments au cycle actuel. Chaque cycle est différent, et c’est important d’en tenir compte au moment d’élaborer nos portefeuilles d’obligations. 

Revenons à 2020 : à mesure que la pandémie se propageait dans le monde, la fermeture de certains pans de l’économie et les mesures de confinement sont devenues la norme. En mars, les marchés ont pris en compte une révision spectaculaire de la croissance des économies mondiales. Par conséquent, les marchés boursiers ont subi une correction de plus de 20 %, les écarts de taux se sont très fortement élargis et la liquidité du marché s’est pratiquement évaporée. Les autorités monétaires sont alors intervenues et ont abaissé les taux directeurs près de zéro, mis en place des programmes d’assouplissement quantitatif, élargi leurs programmes d’achats d’obligations aux obligations de sociétés, et le Trésor a mis en place un important programme de soutien en versant des prestations directement aux consommateurs. 

Notre travail d’évaluation se traduisait alors par une recommandation d’achat des actifs risqués. Nos indicateurs de croissance nous faisaient un peu peur, j’en conviens. Cependant, nos indicateurs de liquidité portaient à croire que les marchés réagiraient favorablement. Dans nos portefeuilles, nous sommes passés à une surpondération des obligations de sociétés et de provinces, en particulier des titres de créance qui, selon nous, seraient fortement avantagés par une reprise économique. 

LW : Bref, en ce qui concerne l’économie, vous avez souligné les mesures monétaires et les importantes mesures budgétaires, qui ont aidé l’économie à se redresser. Il y a aussi les campagnes de vaccination en cours et l’optimisme sur les marchés boursiers. Quelles sont vos attentes en matière de croissance économique en 2021, et à quelle étape du cycle nous situons-nous, selon vous? 

DG : Nous croyons que nous sommes encore au tout début de la phase de croissance du cycle économique : la croissance est positive, il s’agit d’un rebond après la croissance négative de 2020, mais nous ne sommes toujours pas revenus aux niveaux de production pré-pandémie. 

À mesure que 2021 avance et que les vaccins sont distribués, nous devrions constater un redémarrage généralisé de l’économie. La vaccination mènera à l’immunité collective, grâce à laquelle la pandémie sera chose du passé, ce qui signifie que nouveaux épisodes de confinement seront peu probables aux États-Unis avant la prochaine saison de grippe hivernale. Le virus causant la COVID-19 restera probablement parmi nous, mais plus sous la forme d’une pandémie.

À mesure que l’économie redémarrera, les mesures de relance budgétaire pourront être réduites, car le taux de chômage continuera de baisser. La transition d’une croissance soutenue par la relance budgétaire à une expansion économique autonome pourrait être un peu difficile, mais nous surveillerons ça de près. En ce qui concerne la politique monétaire, nous prévoyons que les achats d’actifs seront réduits dès la fin de 2021 et le début de 2022, mais nous ne croyons pas que les taux à court terme augmenteront avant la fin de 2022 ou le début de 2023. Nous prévoyons une croissance très solide en 2021, soit des taux de croissance réels de 4 % et plus aux États-Unis et au Canada. Certains spécialistes tablent même sur des taux de croissance réels de 6 %. Par contre, il faudra attendre au milieu de 2022 pour que l’écart de production soit entièrement comblé. 

LW : Puisque les taux à court terme devraient rester peu élevés et que les banques centrales s’engagent à maintenir les taux à de bas niveaux dans un avenir prévisible, nous constatons que les investisseurs réévaluent le rôle des obligations dans leurs portefeuilles. Qu’en pensez-vous et quelles sont vos perspectives à cet égard? Comment positionnez-vous les portefeuilles de titres à revenu fixe dans ce contexte? 

DG : En 2021, nous prévoyons une poursuite de l’augmentation des taux, en particulier des taux à terme; par conséquent, nous prévoyons que les taux obligataires dépasseront 2 % ou 2,5 % au cours du présent cycle pour les créances à terme. Nous parlons ici des taux à 10 ans et à 30 ans tant au Canada qu’aux États-Unis. Ces taux sont un peu moins élevés que lors du dernier cycle. 

Nous supposons que la cible d’inflation de la banque centrale sera atteinte, mais une inflation galopante est peu probable dans notre horizon de placement, jusqu’en 2023. Nos analyses à long terme et démographiques ne laissent entrevoir aucun problème avec l’inflation. Nous conservons une approche prudente en ce qui concerne la duration, pour le moment, et nous sommes positionnés en vue de l’accentuation de la courbe des taux, tout en conservant une exposition aux titres de créance pour le rendement. 

Dans les fonds équilibrés, les obligations peuvent encore contrebalancer la volatilité des actions. À mesure que les évaluations des actifs risqués augmentent, il en va de même du potentiel de volatilité. Les obligations peuvent toujours avoir un effet atténuant sur le rendement des portefeuilles équilibrés, malgré les taux peu élevés, mais leur effet compensatoire est moins prononcé que lors des cycles précédents. 

LW : C’est bon d’entendre que les obligations ont toujours un rôle dans nos portefeuilles! Vous gérez des titres à revenu fixe depuis des années, et leurs taux fléchissent depuis des décennies. Quelles seront les répercussions de ce contexte de taux extrêmement bas? Quelle sera l’incidence sur les leviers que vous utilisez pour ajouter de la valeur? Les gestionnaires actifs seront-ils avantagés par rapport aux gestionnaires passifs? 

DG : Ce sont là d’excellentes questions. Dans l’actuel contexte de taux extrêmement bas, les rendements potentiels dans leur ensemble sont moins élevés, mais cela est vrai pour toutes les catégories d’actifs, pas seulement pour les titres à revenu fixe. Les leviers n’ont pas changé. La duration, le positionnement sur la courbe des taux et l’exposition aux titres de crédit peuvent toujours ajouter le même alpha relatif aux portefeuilles. Les investisseurs obligataires passifs achètent tous les titres émis sur l’ensemble de la courbe des taux, peu importe la qualité de crédit ou les évaluations. En cette période caractérisée par des taux peu élevés et des écarts de taux étroits, la qualité et la valeur relative permettent aux gestionnaires actifs d’élaborer des portefeuilles plus performants que ceux des gestionnaires passifs. 

LW : Par ailleurs, les écarts de taux ont fortement fluctué en 2020. Je crois qu’à l’apogée de la pandémie, les écarts de taux des titres de catégorie investissement atteignaient 150 points de base, et ceux des obligations à rendement élevé dépassaient les 870 points de base. Depuis, les écarts de taux se sont fortement resserrés dans de nombreux segments du marché et ils sont proches des niveaux où ils se situaient au début de l’an dernier. Ciblez-vous certaines perturbations actuelles sur le marché et, d’une manière plus générale, où voyez-vous de la valeur sur le marché du crédit? 

DG : Dans le cadre de notre processus descendant, nous surpondérons ou sous-pondérons certains secteurs du marché obligataire. Nos analyses nous ont incités à surpondérer les titres de crédit, ce qui a ajouté une valeur considérable en 2020. Notre équipe du crédit consacre beaucoup de temps à examiner les analyses fondamentales; comprendre la sensibilité des titres de crédit est de la plus haute importance. Nous examinons ensuite la valeur relative des titres sous-jacents, ce qui a aussi contribué aux résultats des portefeuilles. Dans nos portefeuilles actuels, nous accordons toujours une grande place aux titres de crédit de sociétés et de provinces, et nous nous attendons à ce qu’ils fassent mieux que les indices de référence, mais dans une très faible mesure ou moins qu’en 2020; nous mettons toujours l’accent sur les secteurs sensibles à l’économie. Il reste de bonnes occasions pour ajouter de la valeur par rapport aux indices de référence, par exemple dans les secteurs de l’énergie et de la consommation discrétionnaire. Nous avons réduit le risque dans ces secteurs, mais nous les surpondérons toujours. Nous continuons d’y repérer des occasions modestes, mais il n’y a pas de raison – nos analyses ne laissent pas entrevoir un abandon massif des titres de crédit à cette étape du cycle. 

LW : En ce qui concerne la sélection des titres de crédit, nous avons observé un nombre considérable de révisions à la baisse des notes de crédit et une augmentation du nombre d’« anges déchus », c’est-àdire des émetteurs de catégorie investissement qui ont été décotés à la catégorie rendement élevé. Pouvez-vous parler un peu de ces perturbations sur le marché et des occasions qu’elles offrent? 

DG : Il y a deux cas dont je peux parler dans notre Fonds d’obligations de base Plus, où nous avons pu investir dans des titres à rendement élevé, et où nous avons profité de l’abaissement de la note de quelques émetteurs à BB (placements spéculatifs) au cours de l’année par une agence de notation (il y a donc une divergence de notations). Il s’agit de Ford Motors aux États-Unis et d’Air Canada. La note de ces deux émetteurs a été abaissée et leurs titres ont commencé à se négocier comme des titres à rendement élevé; nous en avons profité, et ces deux titres ont été avantagés par la reprise économique en 2020. 

Dans nos portefeuilles d’obligations de base, nous avons pu trouver ces derniers temps des obligations liées à une catégorie de capital d’un type relativement nouveau. Il s’agit de titres hybrides émis par des sociétés autres que financières. En ce qui concerne les émetteurs du secteur financier, on les désigne sous le terme de « billets avec remboursement de capital à recours limité » ou BCRL pour les investisseurs obligataires – comme s’il n’y avait pas déjà assez d’abréviations! Ces titres sont émis par des sociétés de catégorie investissement et se situent dans la catégorie inférieure de la structure de leur capital. Ils offrent une prime de rendement par rapport aux titres de créance mieux cotés, et pourtant, il s’agit toujours de titres de catégorie investissement. Au cours de l’année, leurs écarts de taux se sont élargis beaucoup plus que ceux des titres sous-jacents, des titres mieux cotés dans la structure du capital, et nous avons pu en profiter dans nos fonds de base. 

LW : Il semble que la valeur relative ait contribué à vos bons résultats, mais j’aimerais vous poser une autre question, David. Qu’est-ce qui vous tient éveillé, la nuit? Beaucoup de choses se produisent dans ces portefeuilles; y a-t-il des placements qui vous empêchent de dormir? 

DG : Un gestionnaire d’obligations travaille sur un marché hors cote, qui est donc toujours ouvert et ne dort donc jamais vraiment! 

Lorsque vous construisez un portefeuille dont la composition est semblable aux nôtres (nous gérons prudemment la duration, nous sommes à l’affût d’une accentuation de la courbe des taux et prévoyons que les écarts de taux des titres de crédit se comporteront bien en cas de reprise économique), le principal risque macroéconomique serait que quelque chose vienne perturber la reprise économique. Serons-nous confrontés à un variant de la COVID-19? La dernière récession a-t-elle laissé des séquelles économiques? Quel est l’incidence du niveau global d’endettement au sein de l’économie dans son ensemble? Ce sont des éléments que nous surveillons de près. 

Je crains des bulles spéculatives en 2023. Nous avons reçu un important soutien monétaire et budgétaire qui devrait être maintenu encore quelque temps jusqu’à ce que la croissance économique soit indépendante des mesures de relance. Comme ces liquidités ont fait grimper les cours des actifs, je m’inquiète de ce qui pourrait se passer lorsqu’une partie de ces liquidités sera retirée. Voilà ce que nous surveillons, ce que nous ne prévoyons pas, mais nous cherchons toujours à être aussi prudents que possible afin que les portefeuilles continuent d’afficher de bons résultats. 

LW : Merci, David, de nous avoir accordé de votre temps... 

DG : Merci à vous, Linda. Tout le plaisir a été pour moi. 

LW : Mon collègue Tim Hylton va maintenant s’entretenir avec James Black afin de nous offrir un autre point de vue. 

Tim Hylton (TH) : Merci à tous de vous joindre à nous. Je m’appelle Tim Hylton. Je suis premier vice-président chez Beutel Goodman. Aujourd’hui, je m’entretiens avec James Black. James est directeur de la recherche sur les actions chez Beutel Goodman. Il est aussi cogestionnaire de portefeuille principal pour notre Fonds d’actions canadiennes, notre produit vedette, ainsi que pour notre Fonds de dividendes canadiens. Bienvenue James. 

James Black (JB) : Merci, Tim. 

TH: James, l’année 2020 a été intéressante, de toute évidence. Elle a été marquée par les craintes et les réalités liées à la COVID-19. Le marché a fait l’objet de ventes massives à la fin de l’hiver et au début du printemps, avant de se redresser nettement, mais la volatilité a été forte l’année dernière. Pouvez-vous nous parler des avantages et des inconvénients de la méthode de placement rigoureuse utilisée par les équipes des actions de Beutel Goodman? 

JB : Certainement. Vous avez raison : l’année 2020 a été à la fois très intéressante et difficile. Et effectivement, notre processus rigoureux est ce qui nous a permis de garder le cap pendant les jours de turbulence en mars et en avril. Nous croyons depuis longtemps que ce processus nous procure un cadre pour un succès durable qui ne dépend pas d’une seule personne – notre force se trouve dans notre processus et dans notre travail d’équipe. 

Avant qu’un nouveau titre soit ajouté au portefeuille, le processus requiert un rendement minimal de 50 %, ce qui exige une confiance sans réserve soutenue par des analyses approfondies. Ce taux de rendement minimal élevé nous contraint à nous montrer très sélectifs à l’égard des nouveaux titres et se traduit par un portefeuille concentré, un faible taux de rotation et une longue période de détention. En fait, il nous incite à nous comporter comme des propriétaires, et non comme des rentiers. 

Le processus offre aussi un solide cadre pour le risque-rendement, car tant les cours cibles que les cours plancher sont établis avant d’effectuer un achat. Ceux-ci représentent des jalons; nous devons prendre des mesures lorsqu’ils sont atteints ou dépassés. Lorsqu’un placement atteint son cours cible, nous devons liquider un tiers de la position initiale, puis justifier pourquoi nous conservons le reste de la position. Lorsque le cours descend sous le cours plancher, une « deuxième paire d’yeux » doit examiner la thèse de placement et l’évaluation afin de vérifier si le titre reste un bon placement. 

Le processus exige que des décisions actives soient prises en tout temps. Vous m’avez aussi demandé quels étaient les inconvénients. Évidemment, aucun processus n’est parfait. Il est possible parfois de vendre trop tôt ou de commencer à acheter trop tôt. Lorsque nous commençons à les acheter, nos titres sont habituellement boudés par les investisseurs; par conséquent, leurs cours peuvent continuer de baisser. Lorsque nous liquidons nos titres, ils ont habituellement la faveur des investisseurs et peuvent continuer de progresser. Notre processus ne consiste pas à choisir les titres lorsque leurs cours se situent à un sommet ou à un creux. Personne ne peut y parvenir de façon constante, et le coût d’opportunité peut être très élevé si vous vous trompez. 

TH : On reconnaît donc l’arbre à ses fruits — les résultats à long terme. Certains clients nous demandent comment nous pouvons savoir si nous vendons trop tôt ou si nous achetons trop tôt. La vérité, c’est qu’il est très difficile d’évaluer tout ça, en raison par exemple de l’utilisation qu’on fait du produit de la vente, mais aussi de bien d’autres facteurs. Mais sur de multiples décennies, ce processus a donné des résultats remarquables. 

Merci pour ça, James. Voici une autre question, concernant l’état actuel du marché. Le marché semble très divisé. Certains segments sont boudés par les investisseurs et bon marché, tandis que d’autres sont en pleine effervescence et très chers. Comment savez-vous que le moment est venu de délaisser un titre en vogue pour un titre représentant une bonne valeur? 

JB : Tim, vous allez croire que je me répète, mais nous y parvenons grâce à notre processus. Lorsque les titres atteignent leurs cours cibles, nous vendons. Après la vente effectuée dans le cadre du processus, nous établissons un nouveau cours cible. Plus ce nouveau rendement prospectif sera bas, plus il sera probable que nous vendions davantage de titres. Lorsque les cours grimpent et que les rendements prospectifs diminuent, le potentiel d’effervescence augmente et il est de plus en plus probable que nous vendions et que nous déplacions le capital vers de nouveaux titres ou des placements existants dont les rendements prospectifs sont élevés.

Nos décisions d’achat et de vente sont fondées sur notre processus, pas sur une analyse technique de la variation des cours ou d’autres stratégies axées sur le momentum. 

TH : Je pense que c’est ce qui s’est produit l’an dernier avec les sociétés ferroviaires, alors que la COVID-19 frappait dans un contexte de chicanes concernant les tarifs douaniers et les échanges commerciaux. La circulation des marchandises a diminué et, par conséquent, les titres des sociétés ferroviaires ont fortement reculé. Et c’était à peu près à cette période de l’année, le passage du premier au deuxième trimestre. Nous achetions les titres des deux sociétés ferroviaires [Chemin de fer Canadien Pacifique et Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada] parce qu’ils étaient bon marché et, peu de temps après, ils ont atteint leurs cours cibles et nous les avons vendus. Nous ne sommes pas des négociateurs, je le sais. Nous sommes des investisseurs axés sur le long terme, mais en adhérant à un processus rigoureux, nous avons trouvé des titres de grande qualité et peu chers, et lorsqu’une certaine effervescence est apparue, nous les avons liquidés. Je pense que les sociétés ferroviaires représentent un bon exemple de l’année 2020 pour lequel vous avez fait exactement ce que vous disiez que vous JB : Vous avez raison. Et j’ajoute que vous avez bien raison de dire, Tim, que nous ne sommes pas des négociateurs. Nous sommes des investisseurs, et lorsque nous investissons dans un nouveau titre, nous l’examinons comme s’il s’agissait d’une entreprise que nous pourrions posséder de façon permanente. Cependant, lorsque les évaluations deviennent exagérées, ou lorsque les cours cibles sont atteints, notre processus exige que nous réduisions nos positions. 

TH : Exactement. Parlons maintenant des taux d’intérêt, qui ont des répercussions sur les marchés boursiers et les évaluations des entreprises. James, vous avez travaillé comme analyste auprès d’une grande banque, puis à Brookfield avant de vous joindre à Beutel, tout d’abord à titre d’analyste des secteurs des services financiers et des télécommunications. Concentrons-nous sur les banques. Pouvez-vous nous parler des changements dans l’évaluation des banques, dans l’actuel contexte de taux d’intérêt exceptionnellement bas, comparativement à il y a dix ans, lorsque les taux d’intérêt tournaient autour de 5 %. 

JB : Tim, le processus d’évaluation des banques n’a vraiment pas changé. Nous examinons toujours les ratios cours/valeur comptable, cours/bénéfices et le rendement des capitaux propres. En raison de la baisse des taux, les marges nettes d’intérêts ont fortement rétréci, mais le processus d’évaluation n’a pas changé. Par contre, ce qu’il y a d’intéressant concernant la baisse des taux d’intérêt, c’est que même s’ils diminuent depuis 20 ans, voire plus, la rentabilité n’a pas été sensiblement touchée. C’est parce que les banques disposent d’autres leviers de croissance de la rentabilité, comme la gestion de patrimoine et les activités sur les marchés des capitaux, qui donnent droit à des honoraires. Il y a aussi de bonnes occasions de réduire les coûts, étant donné que les activités passent des succursales aux solutions bancaires numériques. 

TH : Très intéressant. Toujours à propos des taux d’intérêt peu élevés : Pouvez-vous nous parler de leurs répercussions sur l’évaluation d’autres entreprises n’appartenant pas au secteur financier, comme celles des pipelines et de l’immobilier? Je sais que votre équipe et vous adoptez une optique à très long terme — je crois que c’est un de vos avantages concurrentiels. Prévoyez-vous une hausse des taux d’intérêt dans l’avenir? Pouvez-vous nous parler un peu des modèles et des prévisions qu’utilisent les analystes de Beutel? 

JB : Bien sûr. Autant que possible, nous ne prenons pas en compte les taux, et nous ne prenons certainement pas de décision fondée sur les secteurs. Nous cherchons à élaborer des modèles fnanciers fondés sur des hypothèses raisonnables de rentabilité durable dans toutes sortes de conjonctures macroéconomiques. Ces dernières années, nous avons eu du mal à repérer de la valeur dans les secteurs des services publics et de l’immobilier, en partie à cause des taux d’intérêt peu élevés qui ont fait grimper les ratios d’évaluation. Nous attendons des perturbations pour acheter de nouveaux titres. En ce qui concerne les titres des télécommunications dans lesquels nous investissons, soit Rogers, Québecor et TÉLUS, il s’agit de sociétés dont les niveaux d’endettement sont très raisonnables, et si les taux augmentent un peu dans l’avenir, il y aura probablement de l’inflation. Ce qui est bien avec des sociétés de grande qualité comme celles-ci, c’est qu’elles possèdent un pouvoir de fixation des prix qui compense la hausse des coûts structurels, y compris celle des coûts de financement. 

TH : Assez de questions faciles! Allons donc un peu plus loin : Rogers est le troisième placement en importance du Fonds d’actions canadiennes, mais le titre déçoit depuis un an ou deux. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il traverse une période difficile et pourquoi vous l’appréciez tellement? Quelles sont les perspectives pour la société et pour le titre? 

JB : C’est une excellente question. C’est vrai que le titre a tiré de l’arrière, mais nous le conservons. Nous croyons qu’il représente une valeur exceptionnelle. l s’agit d’une entreprise de grande qualité qui a été frappée par la pandémie, en raison de la baisse des revenus tirés des services d’itinérance. La société est aussi passée à ce que j’appellerai un « modèle de forfaits où les données sont quasiment illimitées » pour ses programmes haut de gamme, ce qui a donné lieu à des rajustements ponctuels des revenus. Cependant, durant la pandémie la société a apporté d’importants changements à sa structure de coûts. Après la pandémie, nous sommes d’avis que les revenus devraient revenir à la normale; en plus, nous nous attendons à voir l’avantage supplémentaire de certains changements apportés à la structure de coûts. La société possède aussi des actifs non essentiels (participations dans Cogeco Inc., dans Cogeco Communications, ainsi que dans des équipes sportives et l’immobilier) dont la valeur, selon nous, n’est pas prise en compte dans le cours actuel de l’action. 

TH : C’est vrai que Rogers est le propriétaire des Blue Jays — l’équipe reprend d’ailleurs son entraînement du printemps ces jours-ci. Je pensais parler du secteur des télécommunications, mais merci d’ouvrir l’analyse sur cet aspect de la valeur de Rogers.. 

JB : Oui, les Blue Jays, et un peu moins de 40 % des Maple Leafs et des Raptors. 

TH : Toutes de bonnes équipes, du moins en ce moment. Merci pour vos perspectives. Revenons à vos années chez Beutel. Pouvez-vous nommer un titre que vous avez d’abord omis d’acheter, avant de devoir attendre patiemment que son cours revienne à votre zone de confort en matière de valeur? J’imagine qu’il est assez difficile de voir un titre s’envoler, bien se comporter pendant un moment, tandis que ce qu’il vous reste à faire, c’est d’attendre patiemment qu’il redescende. 

JB : Vous savez quoi, Tim? Laisser passer un titre qui vous semblait être une bonne occasion, mais dans lequel vous n’aviez pas toute la confiance nécessaire, et le voir monter, ça fait vraiment mal. CAE est un exemple qui me vient à l’esprit. Il s’agit d’une entreprise de très grande qualité, un fournisseur mondial de premier ordre de simulateurs de vols et de formation aux pilotes. Au cours des 20 dernières années, il y a eu trois excellents moments d’acquérir le titre de CAE : après le 11 septembre 2001, durant la crise financière mondiale et au cours du premier trimestre de l’an dernier. Nous avions raté les deux premières occasions, mais nous avons profité de la troisième, l’an dernier. 

TH : Merci encore, James. Au nom de Beutel et à tous nos clients, merci d’avoir participé à notre première conversation de mi-trimestre. Faites parvenir vos commentaires à votre directeur des relations d’affaires, afin que nous puissions améliorer ces événements dans l’avenir. Bonne journée et encore une fois, merci!

 JB : Merci

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